Avis - « Tous les statuts sont exposés aux risques professionnels »
La protection du bien-être physique et mental devrait être un droit fondamental pour tout professionnel, et ce, quel que soit son statut. La prévention n’est pas un coût social, mais un investissement, indique Gretel Schrijvers, directrice générale de Mensura.
Nous pensons que l’accès aux services de protection et de bien-être au travail pour chaque travailleur est un principe normal et essentiel. Il suffit de consulter les journaux ou les sites d’information pour juger de cette nécessité : burn-out, harcèlement sexuel, nouveaux risques du travail hybride, accidents graves du travail… Cette protection nécessaire ne devrait-elle cependant pas s’appliquer à toute personne qui travaille, quel que soit son statut ?
Autrement dit, peut-on encore défendre la thèse selon laquelle les indépendants ou les statuts spéciaux tels que les travailleurs de plateforme (pensez aux employés d’Uber ou de Deliveroo) ne pourraient pas automatiquement compter sur ces droits fondamentaux ? Les risques professionnels ne disparaissent pas si vous avez le statut d’indépendant ou si vous travaillez pour l’économie du commerce électronique qui fonctionne 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.
Ce décalage s’est malheureusement révélé encore plus frappant à l’apogée de la pandémie. De nombreux prestataires de soins de santé ont alors souffert d’une charge de travail excessive. Les travailleurs enregistrés en tant que salariés avaient droit à un soutien psychologique, contrairement aux médecins ou aux kinésithérapeutes indépendants ayant leur propre cabinet. Pourtant, ils étaient exposés exactement aux mêmes risques.
En résumé, il faut que la loi sur le bien-être au travail soit plus en phase avec les réalités du monde du travail. Dès qu’ils engagent un travailleur, les employeurs sont dans l’obligation de s’affilier à un service externe de prévention et de protection au travail. En contrepartie, chaque travailleur peut consulter des médecins du travail et des conseillers en prévention. Les indépendants ne peuvent pas être soumis à la même obligation, mais ils pourraient avoir accès aux mêmes services moyennant des tarifs horaires.
Ne peuvent-ils pas se rendre chez le médecin généraliste ? En effet, c’est tout à fait possible. Cependant, les experts en prévention ne sont spécialisés que dans les risques liés à un lieu de travail. La relation entre les conditions de travail et la santé physique ou mentale relève du domaine d’expertise du médecin du travail. Les médecins généralistes ont une vision plus globale de la santé et du bien-être mental, mais font moins le lien avec les conditions de travail. C’est tout à fait normal, puisque cet aspect ne fait pas partie de leur formation.
Le fait que les médecins du travail aient aujourd’hui déjà beaucoup de travail ne doit pas être un argument pour repousser cette application plus large de la loi sur le bien-être. Il faut déployer des médecins du travail là où ils peuvent apporter une valeur ajoutée en remplissant intelligemment leur mission. Laissez-les être experts dans leurs domaines, tandis que le personnel infirmier d’entreprise peut accomplir correctement les tâches plus routinières. Par conséquent, une formation officielle et reconnue du personnel infirmier d’entreprise sert l’intérêt de l’ensemble de la population active.